A propos de la musique rébétique

 

 

1922-1931 : LE STYLE DE SMYRNE

 

1922 est l'année où s'achève la guerre gréco-turque : elle s'accompagne de l’échange des populations prévue par le traité de Lausanne, considérée par les Grecs comme la « Grande Catastrophe ». Beaucoup de Grecs d’Asie Mineure s'installent dans les grandes villes de Grèce, apportant avec eux leurs traditions musicales. Principaux thèmes des chansons : consommation de drogue (surtout le haschich), prison, prostitution,  déracinement, thèmes anti-policier et anti-bourgeoisie, maladie (notamment la tuberculose), satire politique, jeu, amour malheureux. Il est difficile de distinguer la chanson rébétique de la chanson de Smyrne. Musiciens et interprètes représentatifs: Rosa Eskenazy, Rita Abatzi, Stelios Perpiniadis, Panayotis Toundas

 

 

1932-1942 : LA PERIODE CLASSIQUE

 

En 1932, circulent en Grèce les premiers enregistrements de rébétika de Markos Vamvakaris. Le style du Pirée devient de plus en plus influent. En 1936, le dictateur Ioannis Metaxas prend le pouvoir et met en place la censure. Par nécessité, la discographie s’adapte aux nouvelles règles et toutes les références aux drogues, ainsi que les éléments jugés trop « orientaux », disparaissent peu à peu des enregistrements. Certains musiciens doivent quitter l'Attique et sont exilés dans les îles, en Épire, à Pylos. Malgré tout, on continue d’écrire des chansons à thématique sulfureuse jusqu’à l’invasion de la Grèce par les Allemands en 1941 mais avec l’occupation cessent tous les enregistrements.

 

 

1942-1952 : L’EPOQUE DE LARGE DIFFUSION

 

La principale personnalité du rébétiko à cette époque est Vassilis Tsitsanis qui fait évoluer le style en l'occidentalisant progressivement. Après la libération de la Grèce, le rébétiko commence à se populariser et sort ainsi des bas-fonds de la société où il était limité jusqu’alors. Le bouzouki est modifié, électrifié, permettant à un style virtuose (illustré par Manolis Hiotis par exemple) de se développer, au prix d'un changement radical de l'esthétique de la musique. Parallèlement la thématique des chansons évolue : ce sont désormais les chansons d’amour et les thèmes sociaux qui sont au goût du jour. De nouveaux rébètes font leur apparition, comme Sotiria Bellou et Marika Ninou.

 

 

LES INSTRUMENTS DE MUSIQUE

 

LE BAGLAMAS

C’est une petite version du bouzouki mais avec un octave supérieur. Il était utilisé seul par les “manguès” qui se trouvaient en prison car il était facile à cacher dans la large ceinture de leur pantalon  sous le veston. Ils pouvaient donc toujours l’avoir avec eux et le sortir quand l’occasion se présentait.

LE BOUZOUKI

C’est l’instrument le plus caractéristique qui descend des Grecs anciens et des instrument orientaux. Autrefois, on l’appelait “trichordo » (le 3 cordes) car il a 3 paires de cordes puis on lui a ajouté une 4ème paire dans les années 50. Long de 60 à 70 cm et possédant un caisson de résonance en forme de demi poire, cet instrument à cordes appartient à la famille des luths à longs manches, comme le saz turc. Il est d'ailleurs probable qu'un saz de taille réduite appelé 'bouzouk saz' lui ait donné son nom.

LE TZOURAS (tambouras) 

Le tzouras est un instrument à long manche de la famille du bouzouki semblable à celui en usage à l’époque byzantine. Son caisson est plus petit. C’était un des instruments favoris des premiers « rébétès » avec le baglama et le bouzouki.

LE LAVOUTO

Le lavouto appartient à la famille des luths et s’apparente à l’outi grec (oud arabe).

L’OUTI (Oud))

Il appartient à la famille des luths qui est utilisé dans le monde arabe. Il a été surtout utilisé par les Grecs de Thrace et d’Asie Mineure qui le ramènent en Grèce après la Grande Catastrophe. Il est souvent accompagné par le violon et par un tambourin (toumbéléki) mais il peut aussi être accompagné par le santouri ou la flûte (klarino).

LE SANTOURI

Il appartient à la famille des instruments frappés, probablement issu des instruments apparentés à la harpe tels que la lyre des Grecs anciens. Il était utilisé dans les psalmodies byzantines. De forme trapézoïdale, il porte deux rangées de cordes parallèles et se joue avec deux fins marteaux aux extrémités enveloppées de cuir. Pour créer un son, le musicien frappe ou gratte trois à cinq cordes ensemble.

LE DEFI

C’est un tambourin avec des petites cymbales que l’on secoue en rythme.

 

LES DANSES REBETIQUES

Les danses rébétiques commencent à être connues vers 1830, dans la Grèce fraîchement indépendante. Mais ce sont les réfugiés d'Asie Mineure arrivés en 1922 qui vont accélérer leur diffusion. Le Rébétiko s'accompagne essentiellement de deux danses masculines, le zeibekiko et le hassapiko ou danse du boucher car c’est cette corporation qui a popularisé cette danse. Il existe aussi le tsifteteli  exécuté par les femmes car il s'apparente fortement à la danse du ventre turque, avec ses mouvements lascifs et voluptueux. Il y a encore d'autres danses liées au Rébétiko, provenant des Balkans ou d'Asie Mineure comme l’aptaliko ou le skarsilama.

LE ZEIBEKIKO

Le zeibékiko, à l'origine,  serait une danse de guerre, exécutée au 18ème siècle par une tribu de guerriers nomades, les Zeibékidès. Ils formaient une force de police adjointe aux sultans turcs, dans l'Empire Ottoman, avant que ceux-ci ne les exterminent, craignant que les Zeibékidès n'échappent à leur contrôle. Le zeibékiko des Rébètès se danse à l'intérieur, généralement dans une taverne et jamais avant le coucher du soleil, contrairement à l'original qui se déroulait en plein air. Cette danse évoque les aléas d'une vie dure et la révolte qu'elle peut engendrer. Celui qui exécute un zeibekiko jouit d'une très grande liberté de mouvements car il danse seul au milieu d'un cercle d'hommes qui apprécient en connaisseurs. Ses gestes allient tension et temps de relâchement et expriment, en phase avec le Rébétiko, l'humeur mélancolique, la violence rentrée, les souffrances et les problèmes accumulés... Le zeibekiko n'a pas de figures établies. Le danseur improvise des pas qu'il termine souvent par des acrobaties. Il commence par de lents mouvements largement circulaires qui deviennent de plus en plus complexes. On peut le voir se courber vers le sol, se balancer avec un verre de vin en équilibre sur la tête, mordre une table et la soulever avec les dents, tout en dansant. Autres signes distinctifs : le rébète garde les yeux rivés au sol et les mains dans une posture de prière.